Métaux de batteries : la RDC dans le top des 5 des pays africains qui veulent mieux se positionner

L’Afrique héberge 30 % des réserves mondiales de minéraux critiques essentiels à la fabrication des batteries électriques. Malgré ce potentiel, les pays producteurs africains exportent encore majoritairement leurs ressources sous forme brute, captant moins de valeur sur un marché en plein essor.

Selon Grand View Research, le marché des batteries devrait être valorisé à environ 320 milliards USD d’ici 2030, avec un TCAC de 16 % de 2025 à 2030. Figurant parmi les principaux producteurs des métaux qui alimentent ces industries, plusieurs pays africains veulent mieux se positionner sur la chaîne de valeur, en transformant localement leurs matières premières ou en allant jusqu’à produire les batteries électriques. Tour d’horizon de cinq acteurs qui affûtent leurs armes, entre atouts indéniables et défis croissants.

RDC : UN GEANT S’EVEILLE

La République Démocratique du Congo est un important producteur de métaux de batteries, dont le cobalt pour lequel elle couvre 70 % de l’offre mondiale. Le pays est aussi le deuxième producteur mondial de cuivre et ambitionne bientôt de produire du lithium avec le gisement Manono. Pour mieux valoriser ses ressources, le projet phare du gouvernement congolais est une zone économique spéciale dédiée notamment à la fabrication de batteries de véhicules électriques.

En partenariat avec la Zambie et les États-Unis, Kinshasa a même signé un protocole d’accord en ce sens en 2022 et les premières estimations font état d’un investissement initial de 30 milliards USD, lequel devrait permettre de capter près de 7.000 milliards USD d’ici 2040. Jusqu’ici cependant, peu de détails sont disponibles sur la manière dont les deux partenaires comptent mobiliser les financements nécessaires.

En attendant, l’État congolais est entré fin juin au capital de Buenassa Resources SA, une société qui développe la première raffinerie de cuivre et de cobalt. D’ici 2027, l’objectif est de produire annuellement 30.000 tonnes de cathodes de cuivre et 5.000 tonnes de sulfates de cobalt. Le DRC-Africa Battery Metals Forum, prévu en septembre à Kolwezi, pourrait être l’occasion d’annonces importantes sur ce dossier.

ZIMBABWE : DES PROJETS DE VALORISATION DU LITHIUM

Pour le Zimbabwe, premier producteur africain de lithium, la transformation locale de cette ressource en produits de qualité batterie est devenue une priorité. Dans cette vision, le gouvernement envisage d’interdire les exportations de concentré de lithium d’ici 2027, afin d’inciter les producteurs locaux à construire des usines de raffinage dans le pays. Les sociétés chinoises Sinomine (mine Bikita) et Zhejiang Huayou (mine Arcadia) œuvrent déjà en ce sens à travers leurs projets de développement d’unités de production de sulfate de lithium.

Le pays veut aussi produire du carbonate de lithium et l’hydroxyde de lithium, utilisés directement dans les batteries électriques. Le développement d’un projet pilote de production de carbonate de lithium de qualité batterie a notamment été annoncé en 2023 par l’Institut de technologie de Harare (HIT).

AFRIQUE DU SUD : UN POLE INDUSTRIEL STRATEGIQUE

Producteur de plusieurs métaux de batterie comme le nickel et le manganèse, l’Afrique du Sud est aussi un pôle industriel phare accueillant plusieurs marques automobiles mondiales. Un atout que les autorités entendent mieux exploiter, avec notamment un budget de 1 milliard de rands (environ 57 millions USD) alloué cette année sous forme de subventions pour la production locale de véhicules électriques et de batteries.

Par ailleurs, plusieurs initiatives majeures de production de cellules de batteries sont aussi en cours dans le pays. Outre la gigafactory d’une capacité initiale de 1,7 GWh/an lancée en 2024 par Balancell, une autre usine dédiée à la fabrication de composants de batteries lithium-ion est aussi annoncée au Cap-Occidental. Ce projet d’une capacité initiale de 1,6 GWh/an est dans sa phase de due diligence, alors que son opérateur Afrivolt cherche à lever les capitaux pour lancer le chantier. Le recours aux acteurs locaux pour l’approvisionnement en métaux n’est cependant pas encore acquis.

ZAMBIE : DES AMBITIONS ET UNE PREMIERE USINE

Deuxième producteur africain de cuivre et fournisseur modeste de cobalt, la Zambie cherche aussi à mieux se positionner sur la chaîne de valeurs des batteries. En dehors du projet commun avec la RDC, le pays compte abriter prochainement une raffinerie pouvant produire du sulfate de cobalt de qualité batterie. Le projet est piloté par la société Kobaloni Energy, qui bénéficie à la fois du soutien de l’Union européenne et de l’Africa Finance Corporation.

L’institution financière panafricaine a signé en février 2024 une déclaration d’intérêt pour fournir un financement de 100 millions USD à la société. En juin 2025, Bruxelles a de son côté intégré le projet à une liste stratégique de projets pouvant bénéficier d’un accompagnement des institutions financières européennes. Lusaka cherche par ailleurs à attirer des constructeurs automobiles, pour des usines de composants de véhicules électriques. Ces projets seraient implantés à proximité des mines de cuivre, a déclaré en mai dernier Situmbeko Musokotwane, le ministre zambien des Finances cité par Bloomberg.

LE GHANA A L’EPREUVE DE LA RENTABILITE

Porté par le projet de lithium Ewoyaa et celui de graphite Kambale, le Ghana veut se lancer aussi dans la production de batteries. Le Fonds souverain minier du pays (Minerals Income Investment Fund) veut même développer au Ghana « la première usine de fabrication de batteries au lithium-ion de la région subsaharienne », selon les mots de son ancien PDG Edward Nana Yaw Koranteng. Seulement, cette ambition se heurte à une réalité difficile à ignorer.

Selon un rapport du Natural Resource Governance Institute (NRGI) publié en mars 2025, précipiter le raffinage local pourrait coûter jusqu’à 500 millions USD de recettes publiques. Si la moitié du concentré d’Ewoyaa est exportée à l’état brut, l’État percevrait 2,7 milliards USD. La même production acheminée vers une raffinerie locale ne rapporterait que 2,2 milliards USD à l’État. En cause, le document cite notamment une compétitivité moindre par rapport à la Chine et des volumes insuffisants pour faire tourner l’usine à plein régime.

PLUSIEURS DEFIS RESTENT A RELEVER

Le cas du Ghana n’est pas unique sur le continent, où les ambitions de certains États se heurtent à différents défis. Outre ceux déjà évoqués, le rapport « Produire des batteries électriques en Afrique : les conditions de la faisabilité » d’Ecofin Pro énumère aussi le déficit en matière d’infrastructures énergétiques sur un continent où près de 600 millions de personnes vivent encore sans accès à l’électricité. À cela s’ajoutent le défaut en capacités techniques et les défis liés au financement.

Pour relever ces obstacles, l’une des solutions proposées par des analystes est la coopération entre les États africains. NRGI propose par exemple au Ghana une coordination avec d’autres producteurs de lithium comme le Mali en vue de soutenir l’approvisionnement d’une éventuelle raffinerie. Dans un autre rapport publié en juin 2024, Tralac souligne que les États africains peuvent attirer davantage d’investissements dans la transformation locale des minéraux critiques, en regroupant leur production afin de peser sur l’offre mondiale.

Avec Agence Ecofin

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *