Bemba accuse : Kabila, Katumbi et la CENCO au cœur d’un complot contre Tshisekedi

C’est un coup de tonnerre dans le ciel politique congolais. Avec des mots pesés et une gravité assumée, Jean-Pierre Bemba a brisé l’omerta sur les réseaux de déstabilisation qui gangrènent la République. Au cœur de cette nébuleuse : Joseph Kabila — alias Hippolyte Kanambe, selon l’ancien ministre de la Défense —, Moïse Katumbi, et certains prélats de la CENCO. Derrière les masques du dialogue et les postures moralisantes, Bemba dévoile un véritable complot visant à renverser Félix Tshisekedi et à remettre le pays sous influence rwandaise. Une opération financée en sous-main et articulée depuis le bastion rebelle de Goma. Plus accablant encore, l’ex-vice-Premier ministre en charge de la Défense nationale révèle que durant les dix-huit années de règne de Kabila, la RDC aurait versé 66 millions de dollars mensuels au Rwanda, en échange de son soutien à la prise du pouvoir. Une accusation explosive qui vient lever un peu plus le voile sur les origines troubles de celui que Kigali a fait émerger à la tête de l’État congolais, selon Bemba. Dans ce climat de guerre hybride, l’Église catholique, par l’entremise d’une frange de la CENCO, apparaît elle aussi compromise. Le ver est dans le fruit : c’est le constat brutal que livre Jean-Pierre Bemba, au risque de déstabiliser les faux équilibres sur lesquels repose encore une partie de la vie politique congolaise.

Les mots sont lourds de sens et leur portée politique, considérable. Au micro de la radio Top Congo FM, dans l’émission Face à face, Jean-Pierre Bemba, vice-Premier ministre en charge des Transports et ancien chef du département de la Défense nationale, a brisé un tabou en accusant frontalement l’ancien président Joseph Kabila, de son véritable nom, selon lui, Hippolyte Kanambe, de tentative de déstabilisation de l’État congolais et de collusion avec le Rwanda. « Je peux vous confirmer que c’est d’actualité et je peux vous dire que j’accuse M. Hippolyte Kanambe, alias Joseph Kabila, Moïse Katumbi et certains acteurs dirigeants de la CENCO, d’être les auteurs d’une tentative de déstabilisation de l’État et également d’atteinte à la sûreté de l’État en voulant éliminer le chef de l’État », a déclaré Jean-Pierre Bemba. Ces propos d’une gravité exceptionnelle interviennent dans un contexte de tensions croissantes dans l’Est du pays, avec la présence des forces rebelles du M23/AFC, soutenues par Kigali, sur plusieurs territoires du Nord-Kivu. Mais l’accusation, lancée par l’un des poids lourds du gouvernement, dépasse le seul théâtre militaire : elle jette une lumière crue sur les rapports troubles entre d’anciens dirigeants congolais et le pouvoir rwandais.

Bemba, dont la parole est aujourd’hui lestée de l’expérience récente au sein du ministère de la Défense, ne s’est pas limité à une simple dénonciation politique. Il a articulé un récit circonstancié sur ce qu’il décrit comme une véritable architecture de déstabilisation, impliquant non seulement Joseph Kabila et Moïse Katumbi, mais aussi une frange des responsables de la CENCO (Conférence épiscopale nationale du Congo), à qui il impute une instrumentalisation politique sous couvert de médiation.

« C’est Paul Kagame qui a pris rendez-vous pour la CENCO avec Emmanuel Macron », affirme Bemba. Une déclaration qui conforte les doutes croissants sur le positionnement réel de certains prélats congolais engagés dans l’initiative du Pacte social pour la paix. Plus incisif encore, le vice-Premier ministre affirme que « les financiers de la CENCO, ce sont Hippolyte Kanambe et Moïse Katumbi ».

Ces révélations interviennent alors que le pays est traversé par un vif débat sur la sincérité de certaines initiatives de dialogue, au moment même où l’État congolais mène une guerre de survie contre les ingérences extérieures.

Kabila, un parcours opaque et des origines troubles

L’intervention de Jean-Pierre Bemba ne s’est pas arrêtée là. Pour la première fois devant un média national, il a détaillé la trajectoire d’arrivée de Joseph Kabila en RDC, une histoire que peu de dirigeants en exercice avaient jusqu’ici osé formuler aussi frontalement.

« L’ancien président de la République est arrivé comment ? Il était l’aide de camp du chef d’État-major général de l’armée rwandaise. Dans ses bagages, il y avait Hippolyte Kanambe qu’on a fait passer pour le fils de Laurent-Désiré Kabila. Or, Hippolyte Kanambe était un agent de l’armée rwandaise. Son chef était Paul Kagame, commandant suprême des forces rwandaises. C’est ça la vérité », a martelé Bemba.

Cette version des faits, longtemps murmurée dans certains cercles diplomatiques et politiques congolais, vient ainsi d’être portée sur la place publique avec une clarté inédite. Le récit proposé par Bemba soulève une question fondamentale : quelle légitimité avait un homme que l’on présente comme un agent rwandais devenu chef d’État d’un pays que Kigali n’a cessé de considérer comme un champ d’expansion stratégique ?

Une ponction invisible : 66 millions de dollars par mois

Mais c’est peut-être l’une des révélations les plus explosives du vice-Premier ministre qui risque de soulever une onde de choc durable : selon Bemba, la RDC aurait versé au Rwanda 66 millions de dollars par mois pendant les 18 années de pouvoir de Joseph Kabila, au titre de prétendue contribution pour avoir aidé à renverser Mobutu Sese Seko. Une assertion stupéfiante, qui évoque l’existence d’un système de captation silencieuse des ressources publiques au profit d’une puissance étrangère.

« Dans la tête d’Hippolyte Kanambe, la RDC est un butin de guerre du Rwanda », affirme encore Bemba. Ce postulat éclaire d’un jour nouveau les alliances informelles, les compromissions et les résistances internes qui paralysent en partie l’État congolais dans sa lutte contre les forces pro-rwandaises opérant à l’Est.

Si ses accusations devaient être confirmées par des éléments probants — ou à tout le moins ouvrir des enquêtes —, le paysage politique congolais pourrait en être durablement bouleversé. Quant à la figure de Joseph Kabila, elle apparaît désormais, au regard de ces propos, plus contestée et plus sulfureuse que jamais.

MAP/RDC

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