L’annonce des « négociations directes » entre Kinshasa et la coalition rebelle AFC/M23 a suscité un mélange de résignation et de colère au sein de la population congolaise. Une amère ironie, pour un pouvoir qui, jusqu’ici, martelait son refus de dialoguer avec des « terroristes » soutenus par Kigali. En cédant à l’inévitable, le Gouvernement tente de sauver les apparences d’une souveraineté érodée.
Accepter de s’asseoir à la table des négociations avec l’AFC/M23, c’est, pour Kinshasa, avaler un poison aux conséquences imprévisibles. D’un côté, l’Exécutif congolais n’a guère le choix : l’enlisement militaire, la chute répétée de villes clés et les pressions internationales – notamment de l’Angola et de la communauté régionale – rendaient intenable le statu quo. De l’autre, cette démarche valide indirectement la thèse rwandaise d’un conflit « congolo-congolais », effaçant d’un trait des années de dénonciations des soutiens de Kigali aux rebelles.
Le Rwanda, en effet, ne peut que se réjouir de voir ses proxies traités comme des interlocuteurs légitimes, tandis que ses propres responsabilités dans la crise sont reléguées au second plan.
Sur le terrain, ces pourparlers sont perçus comme une capitulation déguisée. Les réseaux sociaux bruissent de colère : comment justifier des discussions avec des groupes armés que l’État qualifiait hier encore de « marionnettes étrangères » ? Les familles des victimes, les déplacés des combats, et les millions de Congolais lassés par les cycles de violences voient dans ces négociations un affront à leur résilience. Pire, ils y décèlent un aveu de faiblesse de l’État, incapable de protéger ses frontières ou d’imposer sa souveraineté par les armes.
Existe-t-il une alternative ? La question hante les débats : que faire quand toutes les options semblent mauvaises ? Refuser les négociations, c’est condamner les populations à une guerre sans fin. Les accepter, c’est risquer de normaliser l’impunité des rebelles et de leurs parrains. Entre ces deux pôles, Kinshasa aurait pu – aurait dû – construire une stratégie cohérente, associant pression militaire ciblée, alliances régionales fermes et réformes internes pour couper l’herbe sous le pied des rebellions.
En définitive, Kinshasa joue son avenir sur un échiquier où ses pièces sont déjà en position de faiblesse.